Marion Mezadorian

« C’est un spectacle sur l’écoute et la magie qu’elle engendre... »

Petite, son père lui avait dit qu'elle pourrait trouver des pierres précieuses dans le jardin familial. Puis avec les années, la comédienne Marion Mezadorian comprend que les vraies pierres précieuses, celles qui l'intéressent vraiment, se trouvent dans des instants de vie. De cette révélation naît le spectacle Pépites, mis en scène par Mikaël Chirinian et actuellement au Lucernairedans lequel elle présente une galerie de personnages qu'elle a croisés et qui l’ont émue. Rencontre avec une comédienne singulière, qui nous rappelle que écouter l'autre c'est entrer dans la vie.

« J’ai une admiration folle pour Jacques Villeret... »

Qu'est-ce qui vous a fait aimer / choisir le théâtre ?

Une adrénaline foudroyante à vouloir incarner les autres après avoir passé toute mon enfance à les observer.

Une rencontre artistique décisive ?

J’aurais adoré ! Mais je me suis surtout nourrie depuis petite des personnages solaires, puissants et méditerranéens d’Élie Kakou et Gad Elmaleh, et des acteurs terriens, justes et si humains comme Jean-Pierre Bacri, Jacques Villeret ou encore Josiane Balasko.

Quel est votre personnage fétiche ?

J’ai une admiration folle pour la dramaturgie de Jacques Villeret dans Le dîner de con, Michel Blanc dans Tenue de soirée ou encore Tom Hanks dans Forest Gump. J’adore ce genre de personnages anti-héros, ils sont d’une douceur et d’une poésie folle qui ne peuvent que nous remettre en question avec une grande intelligence.

« C’est un spectacle sur l’écoute et la magie qu’elle engendre... »

Quelle a été la genèse de Pépites ?

En montant à Paris à mes dix-huit ans pour être comédienne, j’avais comme rêve d’écrire mon seule en scène et d’incarner les autres. Et après plusieurs années de jeu, d’observation et de réflexion, je me suis posée sur une table et j’ai fait l’inventaire de ma vie, de toutes les personnes que j’avais rencontrées, qui m’avaient fait mourir de rire, qui m’avaient touchée ou marquée à tout jamais. Ça a donné ce spectacle, Les Pépites.

Vous sentez-vous plus proche du stand-up, du seul en scène, du one woman show ?

Je dirai que Pépites est un mix entre le one woman show et le seule en scène, c’est un conte.

Comment avez-vous rencontré votre metteur en scène, Mikaël Chirinian ?

Par l’intermédiaire de mon producteur Pascal Guillaume, qui m’a suggéré de contacter Mikaël car on partageait la même poésie, et qu’il allait m’apporter ce petit plus qui fait les grands comédiens. Et j’ai été plus que séduite par son approche, sa façon de proposer de manière ingénieuse sans jamais braquer son partenaire, et l’humilité qu’il a de toujours fabriquer avec l’acteur qui est face de lui sans jamais imposer son avis. C’est un très grand artiste, je suis chanceuse d’avoir croisé sa route.

Le rôle du père est prépondérant, ou en tout cas il tient une place de choix ici, est-ce une thérapie ?

Il est à l’origine de l’histoire des Pépites, ce qu’on comprend dès le début du spectacle. Je dirai que c’est plus un témoignage d’amour qu’une thérapie. 

Quelle place occupe l’autofiction dans ce spectacle ?

Tout est vrai. 450 dates plus tard, je ne m’en lasse toujours pas ! 

Comment décririez-vous les personnages que vous faites vivre sur scène ? 

Ce sont les rencontres que j’ai faites dans ma vie, celles qui ont retenu mon attention pour un moment plus particulier ; quand le masque social tombe et qu’on y voit les plus belles failles. Ces personnages défilent sous vos yeux comme des portraits cinématographiques avec leurs doutes, leurs rires et leurs silences. Des vrais moments de vie, un moment “Pépite”. 

Est-ce un spectacle sur la différence ?

C’est un spectacle sur l’écoute et la magie qu’elle engendre, pour se rappeler qu’elle est à la portée de tous. Prendre le temps d’écouter l’autre en face : son mec au quotidien, sa grand-mère et son passé, son gosse qui rentre de l’école et ne parle plus, un sdf qui nous sollicite juste deux minutes pour simplement “papoter” et qui va finalement révolutionner notre journée.

Votre grand-mère est arménienne, que vous a apporté cette culture, ces racines et comment les avez-vous intégrées dans vos Pépites ?

Mon père est arménien, il est né là-bas au nord de l’Arménie, avant d’arriver en France à l’âge de dix ans. Il m’a apporté et transmis l’acharnement au travail et à mes convictions propres, la débrouillardise et l’intelligence humaine, l’intelligence du cœur. Ma grand-mère est juste au-dessus dans l’arbre généalogique, elle a pu m’expliquer une partie de l’histoire du génocide qu’a subi ma famille au début du XXème siècle, avec sa dureté à elle et sa nostalgie troublante. Les deux sont extrêmement drôles et touchants, j’ai voulu partager une partie de leur histoire sur scène.

« Lâchez Netflix... »

Une confidence ?

J’ai la phobie d’être dans le noir total, je suis ce qu’on appelle nyctophobe ! Et le comble, chaque soir je monte sur scène dans le noir total avant que les projecteurs s’allument car c’est ainsi dans la mise en scène, je suis complètement maso de m’infliger ça, un vrai moment de solitude où je pleure de rire seule juste une seconde avant que le spectacle ne commence ! 

Un acte de résistance ?

La parole. Ce spectacle en est un. 

Un signe particulier ?

Hyperactive canalisée ! 

Un message personnel ?

Lâchez Netflix et Uber-eat, retournez au théâtre, dans les salles de cinéma et dans ce petit resto viet ou italien en bas de chez vous où vous adoriez aller il y a encore deux ans !

Un talent à suivre ?

Jessé Rémond Lacroix, pour qui j’ai le plaisir de faire la mise en scène de son premier spectacle. 

Ce que vous n’aimeriez pas que l’on dise de vous ?

Que la remise en question semble complexe ? 

Vos prochains projets ?

Tourner dans des longs-métrages en parallèle de ma propre tournée de spectacle. C’est l’occasion d’incarner un max de Pépites, le pied total en tant qu’actrice !

Publié le
02
.
06
.
2022
Par Jérôme Réveillère

Petite, son père lui avait dit qu'elle pourrait trouver des pierres précieuses dans le jardin familial. Puis avec les années, la comédienne Marion Mezadorian comprend que les vraies pierres précieuses, celles qui l'intéressent vraiment, se trouvent dans des instants de vie. De cette révélation naît le spectacle Pépites, mis en scène par Mikaël Chirinian et actuellement au Lucernairedans lequel elle présente une galerie de personnages qu'elle a croisés et qui l’ont émue. Rencontre avec une comédienne singulière, qui nous rappelle que écouter l'autre c'est entrer dans la vie.

Photo © Svend Andersen

« J’ai une admiration folle pour Jacques Villeret... »

Qu'est-ce qui vous a fait aimer / choisir le théâtre ?

Une adrénaline foudroyante à vouloir incarner les autres après avoir passé toute mon enfance à les observer.

Une rencontre artistique décisive ?

J’aurais adoré ! Mais je me suis surtout nourrie depuis petite des personnages solaires, puissants et méditerranéens d’Élie Kakou et Gad Elmaleh, et des acteurs terriens, justes et si humains comme Jean-Pierre Bacri, Jacques Villeret ou encore Josiane Balasko.

Quel est votre personnage fétiche ?

J’ai une admiration folle pour la dramaturgie de Jacques Villeret dans Le dîner de con, Michel Blanc dans Tenue de soirée ou encore Tom Hanks dans Forest Gump. J’adore ce genre de personnages anti-héros, ils sont d’une douceur et d’une poésie folle qui ne peuvent que nous remettre en question avec une grande intelligence.

« C’est un spectacle sur l’écoute et la magie qu’elle engendre... »

Quelle a été la genèse de Pépites ?

En montant à Paris à mes dix-huit ans pour être comédienne, j’avais comme rêve d’écrire mon seule en scène et d’incarner les autres. Et après plusieurs années de jeu, d’observation et de réflexion, je me suis posée sur une table et j’ai fait l’inventaire de ma vie, de toutes les personnes que j’avais rencontrées, qui m’avaient fait mourir de rire, qui m’avaient touchée ou marquée à tout jamais. Ça a donné ce spectacle, Les Pépites.

Vous sentez-vous plus proche du stand-up, du seul en scène, du one woman show ?

Je dirai que Pépites est un mix entre le one woman show et le seule en scène, c’est un conte.

Comment avez-vous rencontré votre metteur en scène, Mikaël Chirinian ?

Par l’intermédiaire de mon producteur Pascal Guillaume, qui m’a suggéré de contacter Mikaël car on partageait la même poésie, et qu’il allait m’apporter ce petit plus qui fait les grands comédiens. Et j’ai été plus que séduite par son approche, sa façon de proposer de manière ingénieuse sans jamais braquer son partenaire, et l’humilité qu’il a de toujours fabriquer avec l’acteur qui est face de lui sans jamais imposer son avis. C’est un très grand artiste, je suis chanceuse d’avoir croisé sa route.

Le rôle du père est prépondérant, ou en tout cas il tient une place de choix ici, est-ce une thérapie ?

Il est à l’origine de l’histoire des Pépites, ce qu’on comprend dès le début du spectacle. Je dirai que c’est plus un témoignage d’amour qu’une thérapie. 

Quelle place occupe l’autofiction dans ce spectacle ?

Tout est vrai. 450 dates plus tard, je ne m’en lasse toujours pas ! 

Comment décririez-vous les personnages que vous faites vivre sur scène ? 

Ce sont les rencontres que j’ai faites dans ma vie, celles qui ont retenu mon attention pour un moment plus particulier ; quand le masque social tombe et qu’on y voit les plus belles failles. Ces personnages défilent sous vos yeux comme des portraits cinématographiques avec leurs doutes, leurs rires et leurs silences. Des vrais moments de vie, un moment “Pépite”. 

Est-ce un spectacle sur la différence ?

C’est un spectacle sur l’écoute et la magie qu’elle engendre, pour se rappeler qu’elle est à la portée de tous. Prendre le temps d’écouter l’autre en face : son mec au quotidien, sa grand-mère et son passé, son gosse qui rentre de l’école et ne parle plus, un sdf qui nous sollicite juste deux minutes pour simplement “papoter” et qui va finalement révolutionner notre journée.

Votre grand-mère est arménienne, que vous a apporté cette culture, ces racines et comment les avez-vous intégrées dans vos Pépites ?

Mon père est arménien, il est né là-bas au nord de l’Arménie, avant d’arriver en France à l’âge de dix ans. Il m’a apporté et transmis l’acharnement au travail et à mes convictions propres, la débrouillardise et l’intelligence humaine, l’intelligence du cœur. Ma grand-mère est juste au-dessus dans l’arbre généalogique, elle a pu m’expliquer une partie de l’histoire du génocide qu’a subi ma famille au début du XXème siècle, avec sa dureté à elle et sa nostalgie troublante. Les deux sont extrêmement drôles et touchants, j’ai voulu partager une partie de leur histoire sur scène.

« Lâchez Netflix... »

Une confidence ?

J’ai la phobie d’être dans le noir total, je suis ce qu’on appelle nyctophobe ! Et le comble, chaque soir je monte sur scène dans le noir total avant que les projecteurs s’allument car c’est ainsi dans la mise en scène, je suis complètement maso de m’infliger ça, un vrai moment de solitude où je pleure de rire seule juste une seconde avant que le spectacle ne commence ! 

Un acte de résistance ?

La parole. Ce spectacle en est un. 

Un signe particulier ?

Hyperactive canalisée ! 

Un message personnel ?

Lâchez Netflix et Uber-eat, retournez au théâtre, dans les salles de cinéma et dans ce petit resto viet ou italien en bas de chez vous où vous adoriez aller il y a encore deux ans !

Un talent à suivre ?

Jessé Rémond Lacroix, pour qui j’ai le plaisir de faire la mise en scène de son premier spectacle. 

Ce que vous n’aimeriez pas que l’on dise de vous ?

Que la remise en question semble complexe ? 

Vos prochains projets ?

Tourner dans des longs-métrages en parallèle de ma propre tournée de spectacle. C’est l’occasion d’incarner un max de Pépites, le pied total en tant qu’actrice !